Emmanuel de Grouchy naît le 23 octobre 1766 au château familial de Villette à Condécourt, près de Paris.
Aristocrate (il est issu d'une des plus vieilles familles normandes de la noblesse d'épée), fils d'un officier de cavalerie, passé par les écoles militaires, il accueille cependant avec enthousiasme la Révolution et abandonne son rang compromettant de lieutenant-colonel dans les gardes du corps du roi pour faire carrière dans la cavalerie. Il est colonel en 1792 et prend part comme maréchal de camp à la conquête de la Savoie. En mai 1793, il défend Nantes contre les vendéens mais est exclu de l'armée en octobre comme ci-devant noble.
Grouchy est réintégré après le 9 thermidor, promu général de division en 1795 et devient le chef d'état-major de Lazare Hoche à l'armée de l'Ouest. A ce titre, il est présent à Quiberon lorsque sont écrasées les forces conjointes des émigrés venus d'Angleterre et des chouans locaux, puis prend part à l'expédition d'Irlande où, séparé de son chef par la tempête, il n'ose pas prendre la décision de faire débarquer les troupes.
Laissé de côté par Napoléon Bonaparte au moment de constituer l'état-major de l’expédition d’Egypte, il passe à l'armée d'Italie sous les ordres du général Barthélemy Joubert. Là, après avoir contraint le roi Charles-Emmanuel IV de Sardaigne à l'abdication (novembre 1798), il reçoit, à Novi, le 5 août 1799, quatorze blessures et tombe entre les mains des Autrichiens. Sa captivité dure un an, jusqu'à son échange avec un général anglais. Entre-temps, il a envoyé au Directoire une lettre de protestation contre le coup d'État du 18 brumaire qui est arrivée sur le bureau du Premier Consul.
Napoléon Bonaparte ne lui en tient pas rigueur et lui confie le commandement de l'armée des Grisons avec laquelle il chasse les Autrichiens de l'Engadine (région du sud-est de la Suisse). Il est ensuite affecté à l'armée du Rhin et participe à la bataille d'Hohenlinden. Les liens qu'il tisse avec le général Moreau lui attirent cette fois une suspicion qui le prive de commandement important jusqu'en 1805. Cette année là, il investit Ulm puis opère dans le Tyrol.
En 1806, il est lancé à la poursuite des débris de l'armée prussienne après Iéna et obtient la capitulation du général Frédéric- Louis de Hohenlohe-Ingelfingen. En 1807, on le trouve à Eylau et à Friedland où il reçoit une blessure.
Nommé gouverneur de Madrid en 1808, Grouchy réprime l'insurrection du 2 mai, sous les ordres de Murat. 1809 le voit, comte d'Empire encore récent, décider de la victoire à la bataille de Raab (14 juin) puis participer brillamment à la bataille de Wagram (6 juillet).
Nommé colonel général des chasseurs à cheval de la Garde, il prend place désormais parmi les grands dignitaires de l'Empire.
Lors de la campagne de Russie, Grouchy commande d'abord l'un des trois corps de cavalerie puis l'escadron sacré qui assure la protection de l'Empereur lors de la retraite. On lui doit en partie le succès de la Moskowa (7 septembre 1812), bataille au cours de laquelle il est à nouveau blessé.
Il ne se bat pas en 1813, Napoleon Ier lui ayant refusé le commandement qu'il sollicitait dans l'infanterie. Mais il reprend du service en 1814, à la tête de ce qu'il reste de cavalerie et sert à Brienne (29 janvier), La Rothière (1er février), Monmirail (11 février), Craonne (7 mars) où il est grièvement blessé.
Privé de son grade par Louis XVIII, il se rallie immédiatement à Napoléon au retour de l'île d'Elbe. Il reçoit le commandement de l'armée du Midi, avec laquelle il défait les troupes royalistes du duc d'Angoulème, et s'empare de ce prince, fils du Conte d’Artois et neveu du roi. Il en est récompensé par le bâton de maréchal (15 avril 1815), l'ultime distribué par Napoléon Ier.
Commandant de la réserve de la cavalerie lors de la campagne de Belgique, il ternit sa réputation militaire à Waterloo par son manque d'énergie et d'esprit de décision. En s'obstinant à poursuivre des Prussiens insaisissables, selon ses ordres, plutôt que de venir, au bruit du canon, à la rescousse du reste de l'armée, il engage sa responsabilité dans la défaite. Les jours qui suivent le verront cependant réussir une belle retraite.
Proscrit par le décret du 24 juillet 1815 (le même qui enverra le maréchal Ney au poteau d'exécution), il se réfugie à Philadelphie où il demeure cinq ans. Enfin, par une ordonnance de novembre 1819, le roi lui permet de revenir en France et le rétablit dans ses titres, grades et honneurs au 19 mars 1815 – ce qui le prive de sa dignité de maréchal. Il lui faut attendre Louis-Philippe et novembre 1831 pour la récupérer.
Emmanuel de Grouchy, octogénaire, s'éteint à Saint-Etienne, le 29 mai 1847.