Avant la bataille
Echappé de l'île d'Elbe, Napoléon est à Paris le 20 mars 1815. Il a reformé son armée avec une vitesse prodigieuse et 128 000 hommes sont massés à la frontière du royaume des Pays-Bas, dans la région de Beaumont, le 14 juin.
Les Alliés, réunis au Congrès de Vienne, avaient décidé, dès la fin mars, d'intervenir en France et d'y pénétrer par toutes ses frontières. Mais leurs forces étaient démobilisées depuis 1814. Elles ne pourraient entrer en ligne avant juillet. Aussi Napoléon a-t-il conçu de les devancer et de prendre l'initiative. Seules les forces britanniques et hollando-belges sous le duc de Wellington et l'armée prussienne du maréchal Blücher sont prêtes à l'action. Mais les premières se trouvent dispersées dans la partie occidentale de la Belgique, les secondes dans la partie orientale.
Les effectifs français sont supérieurs à ceux de Wellington et à ceux de Blücher séparés, mais nettement inférieurs à ceux des adversaires s'ils parviennent à se réunir. Aussi Napoléon a-t-il décidé le plan suivant: porter ses forces concentrées, en une position centrale, les Quatre-Bras, carrefour des routes de Bruxelles à Charleroi et de Nivelles à Namur, situé à 13 km au sud de Waterloo; frapper ensuite, toutes forces réunies, l'un des deux adversaires, en masquant l'autre, puis se retourner sur celui-ci et l'écraser à son tour.
L'empereur est à Charleroi le 15. Le lendemain se livrent deux batailles: une partie de l'armée française, commandée par Napoléon en personne, bat les Prussiens sur le champ de bataille de Ligny, village situé à 15 km au nord- est de Charleroi; une autre fraction des forces impériales, sous le maréchal Ney, rencontre aux Quatre-Bras des éléments de l'armée de Wellington et ne peut s'emparer du carrefour.
Blücher a promis à son allié britannique de se replier sur Wavre. Le duc décide alors d'accepter la bataille sur le plateau de Mont-Saint- Jean qu'il a maintes fois reconnu. Le 17, par une pluie battante qui succède à l'intolérable chaleur des jours précédents, les 68 000 hommes des forces britanniques et hollando-belges se replient en bon ordre vers la position choisie.
Les forces en présence
Wellington a déployé son infanterie sur deux échelons, depuis la chaussée de Nivelles à droite, jusqu’à un kilomètre environ au delà de la route de Charleroi. Cette infanterie est légèrement en arrière de la crête afin qu'elle échappe aux vues de l'ennemi, selon une méthode mise en oeuvre par le duc dans la Péninsule. L'artillerie, qui se trouve en grande partie sur la crête, avec des batteries en réserve, est protégée par un mince rideau de fantassins. En arrière sont la cavalerie et les unités de réserve. En avant de sa position, le duc a constitué de solides avant-postes qui doivent servir de « brise-lames » à la marée ennemie : les fermes de Hougoumont et de la Haie-Sainte, celles de Papelotte et de la Haie, ainsi que le château de Fichermont.
Les armes anglaises, tant l’artillerie que les fusils, sont plus performantes que celles des soldats français. En effet, contrairement aux canons français qui tirent des boulets en fonte massive, les canons britanniques disposent de schrapnells, boulets explosifs, qui se révèleront d’une grande efficacité pendant la bataille. D’autre part, les soldats de Wellington et de Blücher disposent de fusils d’un calibre supérieur et d’une meilleure cadence de tir que les fusils français.
Le 18 juin
11 h 30
La journée du dimanche 18 juin, à 11 h 30, la bataille débute par une attaque de diversion, menée par la division du Prince Jérôme, frère de Napoléon, contre la ferme d’Hougoumont. On s’y battra farouchement sans que les Français ne réussissent à s’emparer d’aucun des bâtiments.
12 h 30
Préparation de l’artillerie française : 80 canons sont disposés au centre et centre gauche de la ligne alliée.
13 h 30
Attaque à l’est de la chaussée, entre la ferme de la Haie-Sainte et la ferme de Papelotte, des 17 000 fantassins du 1er corps français de Drouet d’Erlon. Reçus par des tirs en salves et repoussés par une attaque à la baïonnette des troupes du Général Picton, ces hommes sont ensuite chargés par la lourde cavalerie britannique. C’est un carnage et le 1er corps reflue en désordre. Emportés par l’action, les cavaliers remontent le vallon pour s’en prendre à la grande batterie. Débandés, leurs montures fatiguées, ils sont alors contre chargés par les lanciers français qui leur infligent de lourdes pertes.
15 h 00
La ligne alliée tient bon. Mais le 1er corps d’Erlon se réorganise et lance un nouvel assaut contre la Haie-Sainte.
16 h 00
Début des charges de la cavalerie française dirigées contre le centre droit allié (emplacement actuel de la Butte du Lion entre la Haie-Sainte et Hougoumont). Menée par le maréchal Ney pendant près de deux heures, ces charges successives aligneront jusqu’à 10 000 cavaliers sur un front de moins de 10 000 mètres. Du côté des alliés, l’infanterie formée en carré résiste. Elle est aidée par ce qui reste de la cavalerie et surtout par l’artillerie postée sur la crête.
17 h 00
Le IVe Corps de Büllow passe à l’attaque vers Plancenoit où l’on se bat au corps à corps. Napoléon envoie la jeune garde sous le commandement de Duhesme.
18 h 30
La situation est très critique pour Wellington après la chute de la Haie-Sainte. Le maréchal Ney peut y mettre quelques canons en batterie et prendre la ligne alliée en enfilade. Il demande de l’infanterie à Napoléon pour exploiter ce succès mais celui-ci a déjà épuisé toutes ses réserves, à l’exception de quelques bataillons de la Garde qu’il hésite à engager. Wellington pare au danger. Il serre alors les rangs au centre en affaiblissant son aile gauche. Il sait que Blücher arrive pour l’y relever.
19 h 30
Napoléon connait la stratégie de Wellington et, après avoir repris Plancenoit, il décide un dernier coup de boutoir pour enfoncer la ligne alliée avant l’arrivée du gros des troupes prussiennes. La Garde impériale remonte le vallon appuyée par tout ce qui reste de valide dans l’armée française. Les grognards, fidèles à la légende, avancent imperturbablement sous la mitraille. Ils vont pourtant ployer sous le nombre car Wellington a appelé toutes ses réserves et repousse la Garde impériale.
20 h 00
Les Prussiens débouchent en masse sur le champ de bataille. Les troupes françaises, voyant reculer la Garde, décrochent en criant à la trahison. On leur avait annoncé Grouchy, c’était Blücher… C’est la débâcle, Wellington lève son bicorne pour donner à ses hommes l’ordre d’avancer.
21 h 00
Les Français refluent en déroute à la seule exception de deux carrés de la Garde qui parviennent à protéger la fuite de l’Empereur. Wellington et Blücher se retrouvent et se serrent la main devant la Belle-Alliance : leurs armées ont remporté la victoire. À la nuit tombante, le champ de bataille présente un spectacle d’apocalypse : près de 12 000 tués, des milliers de blessés gémissent ou agonisent, les cadavres de milliers de chevaux jonchent le terrain où les pillards et les détrousseurs sont déjà apparus. Les derniers blessés ne seront secourus que trois jours plus tard.
(J. H. Frings: dictionnaire de la bataille de Waterloo)